Orientation en IME : ce que j’aurais aimé savoir avant que mon fils y entre
Le jour où la psychologue scolaire m’a dit que l’IME serait « la meilleure solution » pour mon fils, j’ai senti le sol se dérober sous mes pieds. Peur, culpabilité, colère… et puis, les questions. Trop de questions qui se bousculent dans la tête d’un parent qui découvre ce mot : IME.
L’orientation en IME (Institut Médico-Éducatif) concerne les enfants et adolescents de 6 à 20 ans en situation de handicap intellectuel, cognitif ou avec des troubles envahissants du développement. Cette décision, prise par la MDPH après évaluation, vise à offrir un accompagnement éducatif, thérapeutique et pédagogique adapté aux besoins spécifiques de l’enfant.
Si tu lis ces lignes, c’est peut-être que tu es là, toi aussi, dans cette période floue où tout semble incertain. Où tu te demandes si c’est vraiment la bonne décision, si ton enfant va s’y épanouir, si tu n’es pas en train de « l’abandonner » au système.
J’ai écrit cet article pour toi. Pour te partager ce que j’aurais aimé qu’on me dise à l’époque. Aujourd’hui, deux ans après l’entrée de mon fils en IME, je peux te dire une chose : cette orientation a changé nos vies… en bien.
C’est quoi un IME, concrètement ?
Quand on entend « Institut Médico-Éducatif » pour la première fois, on imagine souvent le pire. Moi, j’ai d’abord pensé à un hôpital psychiatrique pour enfants. Quelle erreur !
Un IME, c’est avant tout un lieu de vie adapté où ton enfant va pouvoir grandir à son rythme, entouré de professionnels bienveillants qui connaissent son handicap par cœur. C’est un savant mélange entre école, centre de soins et lieu d’épanouissement personnel.
Qui peut intégrer un IME ?
Les IME accueillent des enfants et adolescents de 6 à 20 ans présentant :
- Une déficience intellectuelle légère à sévère
- Des troubles envahissants du développement (comme les troubles du spectre autistique)
- Des troubles du comportement nécessitant un accompagnement spécialisé
- Des polyhandicaps
Ce qu’on y fait vraiment
Contrairement aux idées reçues, un IME n’est pas un « parking » pour enfants handicapés. C’est un véritable projet de vie qui comprend :
C’est cette approche globale qui fait toute la différence. Ton enfant n’est plus un « cas problématique » qu’on essaie de faire rentrer dans un moule, mais une personne unique dont on développe les potentiels.
Pourquoi mon enfant a été orienté vers un IME ?
Cette question, je me la suis posée des centaines de fois. « Qu’est-ce que j’ai mal fait ? Pourquoi mon enfant n’arrive pas à suivre comme les autres ?
Les signes qui alertent
Pour mon fils, tout a commencé en maternelle. Difficultés de concentration, besoin de bouger constamment, crises inexpliquées, apprentissages qui ne « rentraient » pas. L’enseignante nous a orientés vers le RASED, puis vers le CMP, puis vers une évaluation pluridisciplinaire.
Peut-être que chez toi, c’est différent. Peut-être que ton enfant présente des troubles de l’apprentissage ou un retard global de développement qui nécessitent un accompagnement plus poussé que ce que peut offrir l’école ordinaire.
Le parcours d’évaluation
L’orientation en IME ne se fait jamais à la légère. C’est un processus long qui implique :
- Bilans psychologiques et neuropsychologiques : Pour évaluer les capacités cognitives et les difficultés d’apprentissage
- Évaluations orthophoniques et psychomotrices : Pour mesurer les troubles du langage et de la motricité
- Bilan social et éducatif : Pour comprendre l’environnement familial et les besoins d’accompagnement
- Examens médicaux complémentaires : Si nécessaire pour préciser le diagnostic
Important : Cette évaluation ne vise pas à « étiqueter » ton enfant, mais à comprendre ses besoins pour lui proposer l’accompagnement le plus adapté.
Ce que j’ai ressenti en tant que parent
Soyons honnêtes : accepter une orientation en IME, c’est un deuil. Le deuil de l’enfant « normal » qu’on avait imaginé, le deuil d’un parcours scolaire classique, le deuil de certains rêves qu’on avait projetés sur lui.
La culpabilité de parent
« Est-ce que c’est de ma faute ? » Cette question m’a rongée pendant des mois. Est-ce que j’ai fait quelque chose de mal pendant la grossesse ? Est-ce que j’aurais dû m’y prendre autrement dans l’éducation ? Est-ce que j’abandonne mon enfant ?
Tu n’y es pour rien. Le handicap de ton enfant n’est pas le résultat de tes erreurs parentales. Et choisir l’IME, c’est tout sauf de l’abandon. C’est au contraire le choix courageux de lui offrir ce qu’il y a de mieux pour lui.
La peur du regard des autres
« Qu’est-ce que vont dire les gens quand ils apprendront que mon enfant est en IME ? » Cette peur-là aussi, je l’ai connue. La honte de ne pas avoir un enfant « comme les autres ».
Avec le temps, j’ai appris que le regard des autres ne compte pas. Ce qui compte, c’est le bien-être et l’épanouissement de ton enfant. Et si certaines personnes ne comprennent pas, c’est leur problème, pas le tien.
L’impression d’échec
Parfois, on se dit qu’on a échoué en tant que parent. Que si on avait été plus patient, plus persévérant, plus créatif, notre enfant aurait pu rester en école ordinaire.
C’est faux. Reconnaître que ton enfant a besoin d’un accompagnement spécialisé, c’est faire preuve de lucidité et d’amour. C’est choisir son bien-être plutôt que ton ego de parent.
Les étapes du processus d’orientation
L’orientation en IME suit une procédure bien précise. La connaître t’aidera à mieux t’y préparer.
1. La demande MDPH
Tout commence par un dossier MDPH (Maison Départementale des Personnes Handicapées). Ce dossier, souvent épais et impressionnant, comprend :
- Le formulaire de demande
- Un certificat médical récent
- Les bilans et évaluations de ton enfant
- Un projet de vie (où tu expliques tes attentes et besoins)
Mon conseil : Prends ton temps pour rédiger le projet de vie. C’est là que tu peux vraiment faire entendre ta voix de parent et expliquer qui est ton enfant au-delà de son handicap.
2. L’évaluation par l’équipe pluridisciplinaire
Une équipe de professionnels va étudier le dossier de ton enfant et parfois le rencontrer. Cette équipe comprend des médecins, psychologues, assistants sociaux, et parfois des enseignants spécialisés.
Important : Tu as le droit d’être entendu par cette équipe. N’hésite pas à demander un rendez-vous si tu souhaites expliquer la situation de ton enfant de vive voix.
3. La décision de la CDAPH
La Commission des Droits et de l’Autonomie des Personnes Handicapées prend la décision finale. Elle peut :
- Accepter l’orientation en IME
- Proposer une autre orientation (ITEP, ULIS, etc.)
- Refuser l’orientation
En cas de refus, tu peux faire un recours. En cas d’acceptation, tu recevras une notification d’orientation.
4. La recherche d’établissement
Attention : avoir une notification d’orientation ne garantit pas une place immédiate. Les listes d’attente sont souvent longues. Il faut parfois attendre plusieurs mois, voire années.
Mon conseil : Dès que tu soupçonnes qu’une orientation IME pourrait être proposée, commence à te renseigner sur les établissements de ta région. Va les visiter, rencontre les équipes, inscris ton enfant sur les listes d’attente.
Ce que j’ai découvert (et que je ne savais pas)
L’entrée de mon fils en IME a été pleine de surprises. Voici ce que j’aurais aimé savoir avant.
L’équipe, ta nouvelle famille
En IME, ton enfant va être suivi par une équipe pluridisciplinaire incroyable :
- L’éducateur spécialisé référent : C’est souvent lui qui connaît le mieux ton enfant. Il coordonne son projet individuel et fait le lien avec toi.
- L’enseignant spécialisé : Il adapte les apprentissages aux capacités de ton enfant. Fini la frustration des devoirs impossibles !
- Les thérapeutes (orthophoniste, psychomotricien, kinésithérapeute) : Ils travaillent sur les difficultés spécifiques de ton enfant.
- Le psychologue : Il aide ton enfant à comprendre et accepter son handicap.
Cette équipe se réunit régulièrement pour parler de ton enfant, ajuster son accompagnement, fixer de nouveaux objectifs. Tu fais partie de cette équipe. Tes observations, tes inquiétudes, tes suggestions sont précieuses.
Les progrès sont différents, mais réels
En école ordinaire, on mesure les progrès aux notes, aux compétences acquises selon le programme officiel. En IME, on regarde ton enfant dans sa globalité.
Pour mon fils, les premiers progrès ont été :
- Accepter de rester assis 10 minutes pour une activité
- Dire bonjour le matin sans crise
- Partager un jouet avec un copain
- Utiliser des outils sensoriels pour s’apaiser au lieu de faire une crise
Ces progrès peuvent sembler « petits » vus de l’extérieur, mais pour nous, c’étaient des victoires énormes !
L’inclusion n’est pas oubliée
Contrairement à ce qu’on peut penser, l’IME ne coupe pas ton enfant du monde « ordinaire ». Beaucoup d’IME proposent :
- Des classes délocalisées dans les écoles ordinaires
- Des activités en commun avec d’autres établissements
- Des sorties dans la cité
- Des stages en milieu ordinaire pour les plus grands
L’objectif reste toujours l’inclusion maximale, mais à un rythme adapté à ton enfant.
La famille est accompagnée aussi
En IME, on ne soigne pas que ton enfant, on accompagne toute la famille. Des groupes de paroles pour parents, des formations sur le handicap, des conseils pour aménager la maison, des liens avec d’autres familles…
Cette dimension familiale de l’accompagnement, je ne l’avais pas anticipée. Et pourtant, elle a été essentielle pour notre équilibre.
Mes conseils pour les parents en questionnement
Si tu hésites encore, si tu as peur, si tu te poses mille questions, voici mes conseils de parent qui est passé par là.
Visite plusieurs établissements
Tous les IME ne se ressemblent pas. Chacun a sa philosophie, ses méthodes, son ambiance. N’hésite pas à en visiter plusieurs et à poser toutes tes questions :
- Quel est le projet de l’établissement ?
- Comment sont organisées les journées ?
- Quelle place ont les familles ?
- Y a-t-il des activités d’inclusion ?
- Comment se passent les transitions (entrée, changement de groupe, sortie) ?
Prépare ton enfant en douceur
Quand la place se libère, évite de lui annoncer du jour au lendemain qu’il va changer d’école. Prépare-le progressivement :
- Explique-lui pourquoi ce changement va l’aider
- Visite l’IME avec lui si c’est possible
- Lis-lui des histoires sur les enfants différents
- Rassure-le sur le fait que tu seras toujours là
Garde le lien avec l’extérieur
L’IME ne doit pas devenir un ghetto. Continue à voir des amis, à fréquenter des lieux ordinaires, à maintenir des activités extrascolaires si ton enfant en est capable.
N’hésite pas à expliquer aux proches, aux amis, aux voisins ce qu’est vraiment un IME. C’est en parlant qu’on fait tomber les préjugés.
Fais confiance aux professionnels… tout en restant vigilant
L’équipe de l’IME connaît le handicap de ton enfant mieux que toi sur le plan technique. Mais toi, tu connais ton enfant mieux que personne. Cette complémentarité est précieuse.
N’hésite jamais à poser des questions, à demander des explications, à proposer des ajustements. Tu restes le premier défenseur des intérêts de ton enfant.
Prends soin de toi aussi
L’accompagnement d’un enfant en situation de handicap, c’est un marathon, pas un sprint. Tu ne pourras l’aider que si tu prends soin de toi.
Accepte l’aide qui t’est proposée. Prends du temps pour toi. Garde une vie sociale. Ne culpabilise pas de souffler parfois.
Questions fréquentes sur l’orientation en IME
Mon enfant pourra-t-il un jour retourner en école ordinaire ?
Oui, c’est possible, même si c’est rare. Certains enfants, après plusieurs années d’accompagnement en IME, peuvent intégrer une classe ULIS ou même une classe ordinaire avec des aménagements. Tout dépend de l’évolution de ton enfant et de ses acquisitions. L’équipe réévalue régulièrement le projet de chaque enfant.
Est-ce que mon enfant aura un niveau scolaire en sortant d’IME ?
Les apprentissages en IME sont adaptés aux capacités de chaque enfant. Certains apprendront à lire et écrire, d’autres développeront plutôt des compétences pratiques et d’autonomie. L’objectif n’est pas le niveau scolaire classique, mais l’épanouissement et l’autonomie maximale possible pour chaque enfant.
Comment expliquer à la fratrie que leur frère/sœur va en IME ?
Utilise des mots simples et beaucoup de bienveillance. Expliquer le handicap aux enfants demande de la patience. Explique que leur frère/sœur a besoin d’une école spéciale pour l’aider à grandir et apprendre différemment. Rassure-les sur le fait que cela ne change rien à l’amour que tu leur portes.
L’IME est-il gratuit ?
Oui, l’IME est entièrement pris en charge par l’Assurance Maladie. Les soins, l’éducation, la pédagogie ne te coûtent rien. Seuls certains frais annexes (transport selon la distance, repas si tu le souhaites) peuvent être à ta charge selon ta situation et les modalités locales.
Que se passe-t-il après 20 ans ?
À 20 ans, ton enfant devra quitter l’IME. Selon son niveau d’autonomie, il pourra être orienté vers un ESAT (travail adapté), un foyer d’hébergement, un service d’accompagnement à domicile, ou vivre de manière plus autonome. Cette transition se prépare plusieurs années à l’avance avec l’équipe.
Puis-je refuser l’orientation proposée par la MDPH ?
Oui, tu peux refuser une orientation en IME. C’est ton droit de parent. Mais réfléchis bien aux raisons de ce refus. Si c’est par peur ou par déni du handicap, prends le temps d’en parler avec les professionnels qui suivent ton enfant. Tu peux aussi demander une deuxième évaluation ou visiter des IME pour te faire une opinion plus précise.
Note personnelle : mon témoignage deux ans après
Deux ans après l’entrée de mon fils en IME, je peux témoigner de résultats concrets et mesurables qui ont transformé notre quotidien familial.
Avant l’IME : Mon fils faisait en moyenne 3 à 4 crises par jour, ne supportait aucun contact physique, ne parlait pas et refusait catégoriquement d’utiliser des jouets sensoriels que nous lui proposions. Les sorties en famille étaient devenues impossibles, et notre couple était au bord de la rupture.
Aujourd’hui : Les crises ont diminué de 80% (une crise par semaine maximum), il accepte les câlins et demande même des bisous le soir, il dit une quinzaine de mots et utilise spontanément ses fidgets quand il sent le stress monter. Nous avons pu reprendre les sorties au restaurant et même partir en vacances l’été dernier.
Cette transformation, nous la devons à l’équipe de l’IME qui a su voir le potentiel de mon fils là où nous ne voyions que des difficultés. Ils nous ont aussi appris, en tant que parents, à adapter nos attentes et à célébrer chaque petit progrès.
Si tu lis ces lignes en pleine questionnement, donne sa chance à l’IME. Et surtout, donne-toi le temps d’accepter cette nouvelle réalité. Tu n’es pas seul(e) sur ce chemin.
Construire un avenir serein : checklist pour parents
Accepter une orientation en IME, ce n’est pas renoncer aux rêves que tu avais pour ton enfant. C’est en construire de nouveaux, plus adaptés à qui il est vraiment.
✅ Checklist avant l’entrée en IME :
- J’ai visité plusieurs IME de ma région
- J’ai posé toutes mes questions sur le projet d’établissement
- J’ai préparé mon enfant progressivement au changement
- J’ai expliqué la situation à la fratrie avec des mots adaptés
- J’ai pris contact avec des associations de parents
- J’ai organisé le transport et les modalités pratiques
- J’ai prévu un temps d’adaptation progressif
✅ Checklist pour les premiers mois :
- Je maintiens un contact régulier avec l’équipe référente
- Je participe aux réunions de projet individuel
- J’observe les progrès de mon enfant sans les comparer aux autres
- Je continue les activités extérieures adaptées
- Je prends soin de moi et de notre vie de famille
- J’échange avec d’autres parents d’enfants en IME
Mon fils ne sera peut-être jamais ingénieur comme je l’avais imaginé. Mais aujourd’hui, il sait dire « je t’aime », il adore jouer avec ses balles sensorielles pour se calmer, il a des copains qui le comprennent, et il sourit tous les matins en partant à l’IME.
Ces petites victoires du quotidien, ces progrès qui peuvent sembler invisibles aux autres mais qui sont énormes pour nous, c’est ça, notre nouvelle définition du bonheur.
L’IME n’est pas une fin en soi, c’est un tremplin. Un lieu où ton enfant va apprendre à être lui-même, à développer ses potentiels, à trouver sa place dans le monde.
Et toi, parent courageux qui lis ces lignes, tu n’es pas seul(e). Nous sommes nombreux sur ce chemin, nombreux à avoir eu peur, à avoir douté, et nombreux aujourd’hui à pouvoir dire : « Finalement, c’était le bon choix. »
Fais-toi confiance. Fais confiance à ton enfant. Et laisse-lui le temps de te surprendre.
Cet article reflète mon expérience personnelle d’accompagnement de mon fils vers et dans l’IME. Chaque situation est unique, et il est important de vous faire accompagner par les professionnels qui connaissent votre enfant pour prendre les meilleures décisions. Pour plus d’informations sur l’accompagnement des enfants à besoins spécifiques, consultez nos autres articles spécialisés.